Les Remparts perdent Patrick Roy et Jacques Tanguay

Patrick Roy quitte les Remparts, une semaine à peine après leur couronnement à la Coupe Memorial. Son complice de toujours, l’homme d’affaires Jacques Tanguay, tire lui aussi sa révérence, après 26 années à présider l’équipe.

Il y a huit jours, Patrick Roy et Jacques Tanguay rentraient à Québec en héros, sous les ovations d’une foule de partisans dont le coeur battait au rythme de « leurs » Remparts, devenus conquérants, cette saison, à la fois de la Ligue de hockey junior majeur du Québec (LHJMQ) et de la Ligue canadienne de hockey.

Mardi, les deux hommes brisaient bien malgré eux ces mêmes coeurs en annonçant la fin de l’histoire d’amour qui les lie depuis plus d’un quart de siècle au hockey junior majeur de la capitale.

« Après 26 ans, je pense que c’est le temps de laisser la place à des plus jeunes, à une nouvelle génération, a lancé le président Jacques Tanguay. Merci à tous nos fans, merci pour ce que vous nous avez donné. Merci pour la fierté que vous avez rendue à notre ville. »

Lui et Patrick Roy partent à la manière des Beatles : au sommet de la gloire, atteint dans une série finale de la LHJMQ qui a vu plus de 18 000 billets des Remparts se vendre en moins de 20 minutes, un engouement rare dans le circuit junior.

Le triomphe des Remparts à la Coupe Memorial le 5 juin a scellé le départ du célèbre entraîneur-chef, aussi directeur général du club. « On avait un rêve, puis il s’est transformé en réalité, a souligné l’ancien numéro 33. Dans la vie, il faut savoir partir au bon moment. Quitter dans un contexte comme celui-là, je ne peux pas rêver d’un meilleur scénario. »

Patrick Roy et son complice Jacques Tanguay, homme d’affaires et président des Remparts, partent donc auréolés par les honneurs, au moment où la dernière saison du club prend des allures de sacre pour eux.

Les Diables rouges ont soulevé non seulement le trophée Gilles-Courteau remis aux champions de la LHJMQ, un triomphe auquel l’équipe n’avait pas goûté depuis 1976, à l’époque où Michel Goulet et Kevin Lowe évoluaient dans son uniforme, mais aussi la prestigieuse coupe Memorial, qui couronne les champions canadiens.

« C’est un club qui a gagné le coeur des gens de Québec, mais qui a aussi gagné mon coeur. Je ne serai plus derrière le banc, mais je serai toujours derrière l’équipe », a indiqué Patrick Roy, en remerciant les partisans pour des moments que lui et les joueurs « ne vont jamais oublier ». 

Le sentiment du devoir accompli 

La saison 2022-2023 aura représenté le point d’orgue d’une aventure commencée en 1996, au moment où Jacques Tanguay, Michel Cadrin et Patrick Roy faisaient l’acquisition des Harfangs de Beauport pour ressusciter les Remparts la saison suivante. Québec renouait à la fois avec ses Diables rouges, disparus depuis 12 ans, et avec un de ses fils prodigues, Patrick Roy, né en 1965 dans la capitale pour devenir un des gardiens de but les plus adulés de l’histoire.

Ce dernier a gravé quatre fois son nom sur la coupe Stanley et trois fois sur le trophée Conn-Smythe, remis au joueur le plus utile des éliminatoires. Il s’agit d’un record : encore à ce jour, nul joueur n’a obtenu cet honneur à autant de reprises.

Mardi, les deux hommes ont annoncé partir « sans aucun regret » et avec « le sentiment du devoir accompli », le rire facile et le coeur visiblement heureux de laisser un tel legs à leur ville. Autour des journalistes réunis pour la conférence de presse, toutefois, les mines étaient basses parmi les ténors de l’organisation.

« C’était comme mon grand frère », a confié, les larmes aux yeux, Nicole Bouchard, la directrice des services à l’équipe et des relations médias, véritable alter ego de Patrick Roy au fil des deux dernières décennies. « J’en ai vu, des entraîneurs, dans ma vie, mais aussi passionnés que lui, jamais. C’est probablement la personne la plus déterminée à gagner que j’ai vue dans ma vie. »

C’est un club qui a gagné le coeur des gens de Québec, mais qui a aussi gagné mon coeur

— Patrick Roy

Dès dimanche, Jacques Tanguay et Patrick Roy troqueront le rouge des Remparts pour le vert des terrains de golf écossais. Après un voyage en Italie, l’ancien cerbère du Canadien et de l’Avalanche ignore ce que l’avenir lui réserve, se disant prêt à répondre à toutes les propositions — sauf une : la politique.

Hommages et statues

Le successeur pressenti de Patrick Roy derrière le banc est Simon Gagné, ancienne vedette des Remparts devenue vainqueuse de la Coupe Stanley avec les Kings de Los Angeles en 2012.

Depuis 2022, il officiait à titre d’entraîneur adjoint et de conseiller au directeur général, évoluant dans l’ombre de Patrick Roy en vue de lui succéder. Son mentor se dit convaincu que son protégé a désormais l’expérience pour prendre la bride. « Sans l’ombre d’un doute », a-t-il statué lors du point de presse, mardi matin.

Québecor, entreprise propriétaire des Remparts depuis 2015, n’a pas voulu confirmer la rumeur qui envoie Simon Gagné derrière le banc et le bureau du directeur général la saison prochaine.

Le maire de Québec a tenu à rendre hommage aux deux hommes, multipliant les superlatifs pour ponctuer leur contribution à la Ville.

« Magistral », « énorme », « inestimable » : pour Bruno Marchand, « c’est une page qui se tourne » avec le départ de ces deux hommes ayant « Québec dans le coeur ». La LHJMQ a elle aussi salué le « dévouement exceptionnel » dont ont fait preuve Jacques Tanguay et Patrick Roy pour « faire avancer notre ligue et le hockey junior ».

Certains, dont Jacques Tanguay, rêvent déjà de voir une statue érigée sur la place Jean-Béliveau de Québec pour rendre hommage à Patrick Roy. « [Lui et Jacques Tanguay] méritent d’être honorés par la Ville de Québec et par le gouvernement pour ce qu’ils ont fait », soutient le chef de l’exploitation du Groupe Sports de Québecor, Martin Tremblay, qui est convaincu que les deux ordres de gouvernement vont « bien faire les choses ».