Nikki Haley à la conquête des indépendants et des modérés au ...

22 Jan 2024

Les acclamations avaient une tonalité différente dimanche après-midi à l’arrivée de la candidate à l’investiture républicaine, Nikki Haley, dans un petit restaurant de homard de Seabrook, dans le sud du New Hampshire.

Nikki Haley - Figure 1
Photo Le Devoir

La nouvelle venait de tomber, quelques minutes plus tôt : Ron DeSantis a annoncé qu’il quittait la course, laissant l’ex-ambassadrice des États-Unis aux Nations unies dans un face-à-face ultime avec l’ex-président Donald Trump, à deux jours à peine de la primaire qui va se jouer mardi dans cet État de la Nouvelle-Angleterre. 

« Désormais, il ne reste plus qu’un gars et une femme », a-t-elle lancé tout sourire devant un petit groupe de partisans venus à sa rencontre. « Je vous laisse donc avec ça : que la meilleure femme gagne », a-t-elle ajouté.

La primaire du New Hampshire est entrée dans une nouvelle phase dimanche, en ouvrant la porte un peu plus grande à l’ex-gouverneure de la Caroline du Sud pour la victoire dans l’État de granite. 

« Si Nikki Haley parvient à convaincre les électeurs indépendants et les républicains les plus modérés, il lui est possible de remporter le New Hampshire, ce qui pourrait lui donner un certain élan pour se rendre en Caroline du Sud [prochaine étape de cette course à l’investiture républicaine], résume en entrevue la politicologue Trish Crouse, jointe à l’Université de New Haven, au Connecticut. Le profil des électeurs du New Hampshire est très différent de celui des électeurs de l’Iowa, qui ont tendance à être plus conservateurs. »

L’État a été remporté de manière écrasante par Trump la semaine dernière. « Les électeurs indépendants constituent le plus grand bloc électoral du New Hampshire, et je crois qu’ils pourraient ne pas voter pour Trump s’ils estiment avoir une meilleure option, qui serait désormais Nikki Haley », poursuit-elle.

Jan Louise, venue de Portsmouth pour rencontrer la candidate à Seabrook, fait certainement partie de ce groupe. « J’ai toujours voté républicain, mais je ne me reconnais plus dans ce parti, a-t-elle laissé tomber. La perspective de voir une femme remporter le New Hampshire mardi me fait plaisir. Si elle remporte notre État, je crois que ça va ouvrir les yeux aux gens sur son potentiel d’aller plus loin et de remporter l’investiture. » 

« Il y a absolument de la place dans ce parti pour une personne solide, sérieuse, intelligente et intentionnée comme elle. Pas seulement pour un être détestable, un intimidateur, un menteur… On ne peut plus se permettre un leader comme ça », a-t-elle ajouté, sans nommer toutefois ledit leader : Donald Trump. 

Combattre le chaos

Samedi, lors d’un rassemblement politique à Keene, dans l’ouest de l’État, Nikki Haley a cherché à faire résonner cet appel à un renouveau en invitant ses partisans à « accepter la dure vérité ». « J’ai voté pour lui deux fois, a-t-elle dit. Il a été un bon président au bon moment. Je suis d’accord avec ses politiques. Mais le chaos le suit. » 

« Le chaos le suit, vous savez que j’ai raison, a-t-elle répété. Et on ne peut pas, dans l’état de désarroi dans lequel notre pays se trouve et dans un monde en feu, avoir quatre autres années de chaos. Nous n’y survivrons pas. » 

Nikki Haley - Figure 2
Photo Le Devoir

Photo: Fabien Deglise Le Devoir Dans la campagne du New Hampshire, un «bigfoot» appelle les passants à se rappeler de Donald Trump pour mieux choisir Nikki Haley.

Dans une déclaration envoyée aux médias dimanche par son équipe de campagne, dans la foulée de l’annonce faite par Ron DeSantis, la candidate a également voulu réitérer que la messe était encore loin d’être dite en rappelant qu’un seul État pour le moment avait voté. C’était l’Iowa il y a quelques jours. « La moitié des voix est allée à Donald Trump et l’autre non. Nous ne sommes pas un pays de couronnement. Les électeurs ont leur mot à dire sur le fait de suivre à nouveau la voie tracée par Trump et par Joe Biden ou de choisir une nouvelle voie conservatrice. »

La parole de ces électeurs, Brad Copithorne, bénévole pour la campagne de Nikki Haley, espère d’ailleurs qu’elle s’exprimera de manière « forte et claire » mardi, a-t-il dit à l’entrée d’un rassemblement politique pour la candidate, samedi à Peterborough. « Elle peut rendre Trump vulnérable et attirer les regards autant sur elle que sur un candidat blessé » par une performance moins bonne que celle annoncée par les sondages, cette surprise que le New Hampshire a souvent offerte dans le cadre des primaires. 

Le dernier sondage de l’Université Suffolk, mené la fin de semaine dernière, accorde 57 % des intentions de vote à Donald Trump, soit une avance de 19 points sur Nikki Haley. 

Entre espoir et hostilité

« Le départ de Ron DeSantis fait désormais de Nikki Haley la seule option de rechange républicaine à Trump, et cela peut l’aider à rester dans la course plus longtemps, à récolter de l’argent pour sa campagne et à continuer d’attirer le vote anti-Trump pendant un certain temps », explique Dean Lacy, politicologue et spécialiste de l’opinion publique au Collège Dartmouth. 

L’ex-diplomate a fait valoir qu’elle avait bien l’intention de rester dans la course jusqu’aux primaires de la Caroline du Sud, et même jusqu’au « Super Tuesday » du 5 mars, jour où un gros bloc d’États se rendront aux urnes, peu importe ce qui se passera mardi dans les primaires du New Hampshire, a-t-elle assuré. 

Mais le terrain devient aussi de plus en plus hostile pour elle, puisque la machine Trump n’a désormais plus qu’une cible sur laquelle diriger ses lourds canons et que « la pression des pairs au sein du Parti républicain » va elle aussi aller en s’accentuant « de sorte que la candidature de Donald Trump soit considérée comme la seule viable », ajoute en entrevue Dante Scala, professeur de science politique à l’Université du New Hampshire. 

Dimanche soir, à Rochester, l’ex-président a d’ailleurs concentré ses attaques sur la seule candidate sérieuse à l’affronter désormais, en continuant à la définir comme la candidate de l’establishment républicain et en étalant la liste des politiciens de la Caroline du Sud, l’État de Nikki Haley, qui lui ont accordé leur appui en vue de la prochaine présidentielle. Le sénateur républicain Tim Scott est le dernier en date à s’être rangé derrière le populiste.

Photo: Fabien Deglise Le Devoir Pour Scott Cyganiewicz, rencontré à Keene, au New Hampshire, la candidature de Nikki Haley n'a rien de menaçante pour son candidat, Donald Trump.

« C’est une politicienne de carrière, je ne lui fais pas confiance », a résumé Sue O’Sullivan, une militante trumpiste venue en fin de semaine haranguer les passants et promouvoir la candidature de l’ex-président sur un rond-point de Keene, drapeau en main. « Nous n’avons pas besoin de ça dans notre pays. Ce que l’on veut, ce sont des politiciens qui n’en sont pas. » 

« Les gens ne connaissent pas son nom », a assuré à ses côtés Scott Cyganiewicz, entre deux appels lancés dans son porte-voix en soutien à Donald Trump et à l’urgence d’en faire le grand vainqueur de mardi pour « remettre de l’ordre et ramener de la gloire dans le pays ». « Nikki Haley va avoir à peine une voix », a-t-il promis. 

Puis il a dit : « S’il n’y a pas de fraude électorale dans ces primaires, Donald Trump va remporter le New Hampshire et tous les autres États par la suite. Vous allez voir. » 

À minuit mardi, comme le veut la tradition, la petite communauté de Dixville Notch, dans le nord rural de l’État de granite, sera la première à voter, laissant la poignée de villageois donner un avant-goût de ce scrutin. Un scrutin qui est sans doute le dernier à permettre à Nikki Haley d’imposer une nouvelle trajectoire dans cette course à l’investiture républicaine.

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