Umar Zameer est acquitté de meurtre à Toronto : « Nous voulons ...

Umar Zameer peut respirer : après près de trois ans d'angoisse, l'homme de 35 ans est aujourd'hui libre. Il a été acquitté dimanche sur toute la ligne du meurtre prémédité de l'agent Jeffrey Northrup à l'issue d'un procès retentissant de cinq semaines à Toronto.

Umar Zameer était accusé d'avoir happé l'agent Jeffrey Northrup, du Service de police de Toronto, avec sa voiture dans le stationnement souterrain de l'hôtel de ville de Toronto en 2021.

À la sortie du jury, la juge Anne Molloy a présenté des excuses à Umar Zameer pour tout ce qu'il a dû endurer pendant près de trois ans.

Vous êtes maintenant libre, lui a-t-elle dit avant de quitter le prétoire.

La famille Zameer, déjà en pleurs depuis le prononcé du verdict, a redoublé de joie, lorsque M. Zameer est allé serrer sa femme dans ses bras, entouré de tous leurs proches.

À l'extérieur, l'avocat de la défense, Nader Hasan, a expliqué que son client est très soulagé et qu'il peut retourner chez lui refaire sa vie, parce que ses dernières années ont été très difficiles.

Sa fille est née en août 2021 alors qu'il était encore en détention préventive, rappelle-t-il.

Umar Zameer était jusqu'à aujourd'hui assigné à résidence, sous de strictes conditions, depuis qu'il avait été libéré deux mois après son arrestation en moyennant une caution de 335 000 $.

À sa sortie du palais de justice, dimanche, le nouvel arrivant au Canada a dit qu'il était heureux et qu'il n'avait jamais voulu tuer ou blesser l'agent Northrup cette nuit-là.

Je suis désolé de ce qui est arrivé, a-t-il dit. Il n'a pas répondu aux questions des journalistes.

Umar Zameer ajoute que sa famille a longuement discuté de son choix d'immigrer de Malaisie au Canada en janvier 2019 et qu'il pensait que lui et sa femme avaient pris la mauvaise décision.

Nous voulons maintenant remercier le Canada pour ne pas avoir laissé une injustice se produire dans cette affaire

Me Hasan affirme que ce verdict n'est pas une raison pour célébrer malgré tout, parce qu'il y a eu mort d'homme. C'est toutefois un jour de soulagement, parce que le système judiciaire, cette fois, a fonctionné, ajoute-t-il.

L'avocat souligne enfin que son client n'aurait pas dû être accusé de meurtre dès le début dans cette cause et il encourage les corps de police au pays à revoir leur protocole sur les façons d'aborder les citoyens en public, en particulier la nuit, lorsque les agents sont vêtus en civils.

Il est possible aussi que ces protocoles soient clairs, mais reste à savoir si ce sont tous les policiers qui les suivent à la lettre, conclut-il.

La veuve de l'agent Northrup, Margaret Northrup, s'est elle aussi adressée à la presse.

Je suis très déçue du verdict, tout ce que je voulais depuis le début de ce processus judiciaire était une reddition de comptes, a-t-elle déclaré sans répondre aux questions.

À entendre le verdict, la famille Northrup et les policiers qui l'accompagnaient dans la salle d'audience n'avaient pas caché leur surprise et leur désapprobation.

Le réconfort des procureurs n'a pas semblé apaiser Mme Northrup en pleurs.

Personne dans ce procès ne remettait en question le fait que l'accusé conduisait la voiture qui a percuté mortellement l'agent Northrup.

À l'époque, une opération policière était en cours au centre-ville, après une attaque au couteau dont l'accusé n'est nullement responsable.

Umar Zameer, sa femme enceinte et leur fils de deux ans avaient néanmoins croisé un homme au torse nu et blessé à l'abdomen en retournant au garage pour rentrer chez eux.

La famille, qui était au pays depuis 18 mois seulement, s'était rendue de sa banlieue torontoise au centre-ville pour tenter d'y voir les feux d'artifice de la fête du Canada, tard la nuit du 1er juillet 2021.

L'agent Northrup et sa coéquipière Lisa Forbes, qui étaient vêtus en civil, faisaient des recherches à pied dans le garage.

Ils étaient assistés par plusieurs autres policiers, dont deux se trouvaient dans une voiture de police banalisée et aux vitres teintées.

Les policiers en civil avaient reçu de leur répartiteur le signalement d'un homme brun avec une barbe, dont la description ressemblait, selon eux, à Umar Zameer.

Ils l'avaient décrit comme un homme à la peau brune d'environ 1,80 m avec des cheveux épais et une barbe.

Dans ce procès, la Couronne a toujours prétendu qu'Umar Zameer savait très bien qu'il faisait affaire avec des policiers, lorsque les agents Northrup et Forbes l'ont abordé dans le stationnement, mais qu'il a choisi de prendre la fuite en fonçant délibérément sur la victime.

La défense croit plutôt que la mort de l'agent Northrup est un terrible accident qu'elle explique par un concours de circonstances malencontreuses.

Les policiers avaient en outre confondu, selon elle, Umar Zameer avec le suspect d'une attaque au couteau dans le quartier.

Le chef de la police de Toronto, Myron Demkiw, a déclaré à l'extérieur du tribunal qu'il respectait la décision du jury, même si nous nous attendions à un autre résultat.

Il rappelle que la mort de l'agent Northrup est une tragédie et que son absence est une perte épouvantable pour sa famille, sa coéquipière, son service et la communauté.

Chaque policier devrait pouvoir rentrer chez lui ou chez elle après son travail et retrouver sa famille

Le président de l'Association des policiers de Toronto, Jon Reid, a pour sa part déclaré que le verdict était décevant, frustrant et enrageant.

M. Reid a rappelé que l'agent Northrup était un héros et que son association allait continuer à épauler sa veuve et leurs enfants dans cette épreuve.

Les procureurs Michael Cantlon et Karen Simone, qui ont connu beaucoup de difficultés à démontrer au jury leur théorie, n'ont pas voulu s'adresser à la presse.

Dans un communiqué, ils écrivent que les événements entourant la mort tragique de l'agent Jeffrey Northrup justifiaient un procès pour déterminer toute responsabilité dans cette affaire.

Nous avons une grande confiance et un grand respect dans notre système de justice, conclut Me Cantlon.