De Kingston à tout le Canada : les Tragically Hip célébrés dans une ...

Deux semaines après avoir conquis le public au Festival international du film de Toronto (TIFF), remportant le prix du public du meilleur documentaire, la nouvelle série The Tragically Hip : No Dress Rehearsal fait découvrir la fierté de Kingston au petit écran.

Tragically Hip - Figure 1
Photo ICI.Radio-Canada.ca

Diffusée sur Prime Video à partir du 20 septembre, cette production intime, réalisée par Mike Downie, frère du défunt chanteur Gord Downie, nous plonge dans l’histoire d’un groupe culte qui a marqué le paysage musical canadien pendant près de 40 ans.

La série de quatre épisodes d’une heure a d’abord été présentée en avant-première au TIFF, où le public a témoigné son amour au groupe en descendant chanter ses chansons dans les rues du centre-ville de Toronto après la projection.

Le documentaire « The Tragically Hip: No Dress Rehearsal », du réalisateur Mike Downie, a remporté le prix du public pour documentaire.

Photo : Radio-Canada / Rozenn Nicolle

La série s’intéresse à la trajectoire exceptionnelle des Tragically Hip, de leurs débuts dans les bars de Kingston dans les années 1980 à leur ultime tournée en 2016, alors que Gord Downie souffrait d'un cancer en phase terminale.

Un regard intime et un hommage touchant à un groupe dont l’impact dépasse largement les frontières de l’Ontario.

Un travail autant introspectif que rétrospectif

Avec des images inédites, des prestations jamais diffusées et des témoignages sincères, cette série documentaire retrace en détail des pans de l'histoire de ce groupe qui a marqué la scène musicale canadienne à jamais, comme le témoignent leurs neuf albums numéro un au pays et leurs 17 prix Juno.

Tragically Hip - Figure 2
Photo ICI.Radio-Canada.ca

La création de The Tragically Hip : No Dress Rehearsal a été un défi pour Mike Downie.

C’est le plus gros projet sur lequel j’ai travaillé, explique-t-il, mais c’était surtout une occasion de se replonger dans les souvenirs et les moments forts du groupe de son frère, qui a su capturer en chanson l’essence du Canada.

En 2021, alors qu'il était en train de présenter son projet à Amazon, Mike Downie se souvient d'avoir été interrompu par les représentants de Prime Video : ils tenaient à ce que cette rétrospective voie le jour coûte que coûte.

La série en quatre épisodes est diffusée sur Prime Video à partir du 20 septembre.

Photo : Prime Video

Prime Video, c’est la plus grande compagnie au monde, et je n’en revenais pas quand ils ont dit qu’ils voulaient faire cette série. Je réalise et vends des documentaires depuis 30 ans, et ça ne se passe jamais aussi facilement que ça. Mais ça a lancé la machine presque immédiatement.

Entre 2017 et 2022, les membres du groupe ne se parlaient que très peu, explique Mike, mais leur réunion autour de ce projet après des années de silence a permis de raviver des liens profonds. Ils ont fait face à l’adversité, à des conflits internes, et pourtant, leur amitié est restée le ciment qui les unit, raconte le réalisateur.

Tragically Hip - Figure 3
Photo ICI.Radio-Canada.ca
La fierté d’une ville : Kingston et les Hip

Pour les résidents de Kingston, les Tragically Hip représentent bien plus qu’un simple groupe de rock. On est imprégné de l’aura des Hip. C’est la fierté de la ville, s'exclame Éric Galarneau, qui vit à Kingston depuis une vingtaine d’années.

Il y a le Tragically Hip Way, qui est la rue devant notre grand aréna. Il y a le Gord Downie Pier… Les Hip, c’est un peu partout! Ça fait partie de la fibre kingstonienne.

Cette proximité avec les membres du groupe va plus loin que les infrastructures qui portent leurs noms : malgré leur statut de vedettes, ils sont restés proches de la communauté.

Le maire de Kingston, Bryan Paterson, dit que sa chanson favorite des Tragically Hip est « Ahead by a Century ». (Photo d'archives)

Photo : La Presse canadienne / Lars Hagberg

Ils ont grandi à Kingston et de temps en temps, on peut parler à quelques membres du groupe qui habitent encore [ici], raconte le maire de la municipalité, Bryan Paterson, dont la chanson favorite est Ahead by a Century.

Il y a beaucoup de fierté dans la communauté. Le groupe The Tragically Hip, ce n'est pas seulement un groupe musical — c'est une partie de notre famille.

Ce lien fort avec la ville et le sud de l’Ontario se reflète dans la manière dont le groupe a intégré des récits locaux dans ses chansons qui nomment des villes comme Bobcaygeon, Millhaven et Toronto, et qui ne sont rien de moins que l'histoire du Canada mise en chanson.

Tragically Hip - Figure 4
Photo ICI.Radio-Canada.ca

La chanson Fifty Mission Cap, par exemple, parle de l’ancien joueur des Maple Leafs de Toronto, Bill Barilko, mort dans un écrasement d’avion après avoir marqué le but de la victoire qui a permis aux Leafs de remporter la Coupe Stanley en 1951. La chanson Wheat Kings, elle, évoque le cas de David Milgaard, qui a passé 23 ans en prison pour un meurtre et un viol qu’il n’a pas commis.

Un phénomène qui transcende les frontières linguistiques

Bien que le groupe soit anglophone, les Tragically Hip ont d'ailleurs su toucher le cœur des francophones du Canada.

Judy Duguay, une résidente de Kingston originaire de Trois-Rivières, se rappelle sa surprise lors de sa première rencontre avec le groupe lors d’un passage au FestiVoix dans sa ville natale, en 2007 : Je ne pensais pas que les gens les connaîtraient. Le festival était plein et tout le monde chantait. Même au Québec, les gens connaissent les paroles.

The Tragically Hip en concert en 2016 à Edmonton

Photo : Mike Homer

Mike Downie, dans une réflexion sur l’intérêt du groupe pour le Canada français, confie : Je sais que Gord voulait faire un album en français, et je pense que l’artiste en lui voulait se mettre au défi.

Une proximité sentimentale qui s'explique par la géographie de la ville d’origine des Hip, puisque comme le réalisateur le souligne, on n’est pas de Toronto, nous, on est de Kingston.

Tragically Hip - Figure 5
Photo ICI.Radio-Canada.ca

Les gars du groupe étaient très conscients de l’expérience québécoise. Ils ont grandi avec le mouvement séparatiste des années 80 et 90. Ils ressentaient l’attraction du Québec, étant si proches de la frontière.

Une série qui permettra de faire le deuil

La mort de Gord Downie en 2017 a laissé un vide immense chez ses amateurs comme chez ses proches. Pour son frère, la création de cette série documentaire sur le groupe n’était rien de moins qu’une façon de gérer son deuil.

Parler de mon frère à autant de gens à travers ces entrevues… Je ne veux pas dire que c’était une forme de thérapie, mais c’est probablement vrai. J’ai souvent fondu en larmes pendant les entrevues, et souvent, le sujet pleurait aussi. On pleurait tous les deux, avoue-t-il.

Les gens se sont massés dans le centre-ville de Kingston pour regarder le dernier spectacle des Tragically Hip sur des écrans géants le 20 août 2016.

Photo : La Presse canadienne / Lars Hagberg

Les résidents de Kingston qui ont assisté au dernier concert du groupe au Centre K-Rock en août 2016 ont eux aussi vécu un moment d’intense émotion.

Judy Duguay, qui était présente à cet événement historique, se souvient : L’atmosphère était extraordinaire. On était tous au courant que Gord Downie était pour mourir… Il y avait vraiment une atmosphère d’amour, puis de paix.

Ce concert, suivi par près de 12 millions de Canadiens à la télévision (Nouvelle fenêtre), représentait un moment cathartique pour tout le pays.

Sept ans après la mort de Gord, Judy espère que cette série documentaire permettra au Canada de sourire après son deuil collectif. Elle y voit notamment une façon de transformer la perte d’un de ses artistes préférés en une célébration de sa vie et de son œuvre.

Avec le temps, on est content de ressusciter ces choses-là. Et on est content d’en parler et on a un sourire, dit-elle, en ajoutant que Ça nous fait du bien.

Read more
Similar news
This week's most popular news