Le congé de TPS aura-t-il un impact sur votre porte-monnaie?
Souhaitant donner un répit aux consommateurs, le gouvernement Trudeau entend couper temporairement la TPS sur une panoplie de produits de consommation populaires pendant les Fêtes : du chocolat au vin en passant par les jeux de société. Mais la mesure aura-t-elle un impact sur le portefeuille des Canadiens ?
« L’impact sur la facture d’épicerie va être minime. Soit ce sont des aliments qui ne coûtent déjà pas très chers, soit ce sont des produits qui ne sont pas essentiels et qui ne se retrouvent pas souvent dans le panier des consommateurs », répond d’emblée Sylvain Charlebois, directeur scientifique du laboratoire de sciences analytiques en agroalimentaire de l’Université Dalhousie.
Rappelons que la taxe sur les produits et services (TPS), dont le taux est de 5 % du prix de vente, ne s’applique pas d’ordinaire aux produits alimentaires de base dont les fruits, les légumes, les produits laitiers, les oeufs, le pain, le poisson et la viande. La mesure du gouvernement libéral, si elle est adoptée, viendrait ajouter à cette liste pendant deux mois plusieurs aliments et boissons d’épicerie davantage consommés pendant les repas des Fêtes.
« Notre objectif est de vous aider à célébrer en famille et entre amis et à entamer l’année 2025 avec un peu plus d’argent dans votre compte bancaire », s’était justifié la ministre des Finances, Chrystia Freeland, par voie de communiqué avant l’annonce officielle du premier ministre jeudi.
Parmi les produits concernés par la mesure d’Ottawa figurent les plateaux de fromage, de charcuterie, de fruits et de légumes, les salades préparées, les sandwichs et les croustilles. La TPS sera aussi retirée du prix de vente des boissons gazeuses, des jus de fruits, de l’eau embouteillée, ainsi que des boissons alcoolisées. Cela comprend notamment le vin, la bière et le cidre à moins de 7 % d’alcool, mais pas les spiritueux, plus forts en alcool.
On retrouve aussi dans la liste des desserts et sucreries en tout genre : les bonbons, les chocolats, la crème glacée, les gâteaux, les muffins, les tartes, les biscuits, les beignes et autres pâtisseries. Les produits de boulangerie de type bagels ou muffins anglais seront aussi concernés, ainsi que les produits granolas et les mélanges de grignotines à base de noix ou de céréales.
Ceux qui aiment plutôt fréquenter les restaurants, les bars, les cafés ou faire appel à un traiteur pendant les Fêtes ne seront pas en reste. Tous les aliments et boissons vendus dans ce type d’établissements seront aussi exemptés de la TPS.
Malbouffe et jeux vidéo
« La mesure du gouvernement ne fera pas une grande différence dans le quotidien des gens », croit aussi Maryse Côté-Hamel, professeure en science de la consommation à l’Université Laval. « Beaucoup de ces produits ne se retrouvent pas dans le panier des consommateurs qui se serrent la ceinture depuis des mois. Je ne vois pas en quoi ça va vraiment les aider ».
Elle se dit surtout surprise devant la qualité des aliments et des boissons qui se retrouvent dans la liste « des essentiels des Fêtes » du gouvernement. « Veut-on vraiment encourager les gens à boire de la bière, manger des chips et des bonbons ? », se questionne-t-elle.
Mme Côté-Hamel se montre aussi critique envers les produits de consommation matériels — visiblement destinés à se retrouver sous le sapin le 25 décembre — que le gouvernement souhaite détaxer.
Si elle voit d’un bon oeil le fait d’enlever la TPS sur les jeux de société, les jeux de cartes ou de construction, ainsi que sur les livres et les journaux imprimés, elle questionne la présence des jeux vidéo et de leurs consoles dans cette liste.
« Les études le montrent, on ne devrait pas encourager les jeunes à rester devant leur écran à jouer à des jeux vidéo, souligne-t-elle. Pourquoi ne pas détaxer les articles de sport à la place ? On sait à quel point le prix des accessoires sportifs peut être un frein à la pratique alors que le sport apporte de nombreux bénéfices. »
De l’aide aux famillesPour alléger le fardeau financier des familles, le gouvernement compte aussi enlever la TPS sur les vêtements et chaussures pour enfants, sur les sièges auto ou encore les paquets de couches. Une mesure davantage applaudit par les experts consultés par Le Devoir.
Les familles économiseront 2 $ par paquet de couches de 40 $, et récupéreront entre 7 $ et 10 $ à l’achat d’un siège auto se détaillant entre 150 $ et 200 $.
« Ça reste qu’avec 5 % de rabais, il faut faire des achats importants pour que ça fasse une vraie différence, note la professeure Côté-Hamel. Là encore, je doute que les familles qui ont besoin d’aide achètent des vêtements neufs ou des chaussures neuves à 150 $ à leurs enfants. Elles se tournent probablement vers l’usager en temps normal. […] Ce ne sont pas les personnes à plus faibles revenus qui vont en tirer le plus grand bénéfice, c’est certain. »