Bouillon de nostalgie avec The Cure au Centre Bell

17 Jun 2023

Un vendredi, retomber en amour avec The Cure : au premier de ses deux concerts consécutifs au Centre Bell, le légendaire groupe alternatif anglais a ravi ses vieux fans qui ont bu jusqu’à la lie une trentaine de chansons déversées pendant plus de deux heures trente. Une averse de succès en ce petit vendredi soir tristounet, pluvieux dehors, chaleureux dans l’aréna, toujours un peu taciturne sur scène puisque quarante-cinq ans (ou presque) après la parution de leur premier album Three Imaginary Boys, Robert Smith et sa bande demeurent les éternels romantiques éplorés qu’ils ont toujours été. Tant mieux.

The Cure - Figure 1
Photo Le Devoir

La chanson titre de ce premier album en carrière a été interprétée en plein milieu du concert – ou plutôt de la partie principale de celui-ci, avant les deux généreux rappels. Three Imaginary Boys a secoué les puces, guitares à l’avenant, Smith hurlant comme il le fait rarement, un cri du coeur survenant après un début de concert doux et mélancolique durant lequel il a glissé Pictures of You et la suave Lovesong tirées du classique Disintegration (1988), ainsi qu’A Night Like This, de The Head on the Door (1985).

Le groupe avait donc lentement lancé la soirée, avec une nouvelle chanson d’ailleurs, un geste assez couillu pour un groupe qui n’a pas proposé d’album depuis quinze ans et aguiche son public depuis le printemps 2019 en lui promettant non pas un, mais deux nouveaux albums. On en entendra d’autres inédites en cours de route, dont A Fragile Thing (vite oubliée) et la ballade farcie de violons synthétique And Nothing is Forever, réussie celle-là parce que ressassant nos souvenirs d’ado au coeur écorché dont l’oeuvre de The Cure paraissait être la bande-son toute désignée.

Deux heures et demie de nostalgie, voilà ce pourquoi les fans ont déboursé des billets à grands frais, ce qui a courroucé Smith au point de dénoncer publiquement la billetterie Ticketmaster. The Cure a, en revanche, tout fait pour donner l’impression que le public en aura pour son argent, servi par des conditions idéales : une sonorisation jamais appuyée, des musiciens diligents, Robert Smith en excellente forme vocale et l’essentiel Simon Gallup ne faisant pas ses 63 ans, faisant courir ses formidables lignes de basse sous les nappes de synthés de Roger O’Donnell.

La scénographie était dépouillée, ce qui avait le mérite de glorifier le répertoire, qui se passe très bien de passerelles tape-à-l’oeil et autres artifices. L’accessoire standard des tournées d’arénas, l’écran DEL géant, servait surtout à projeter l’image des musiciens alignés devant leurs amplis, avec le batteur Jason Cooper trônant sur un plateau au centre. Dans l’ensemble, The Cure n’est pas l’orchestre le plus dynamique à voir jouer, mais Robert Smith se charge de captiver l’auditoire : il y a, dans sa gestuelle posée, dans sa voix toute en retenue, une forme de sincérité qui ne cesse d’émouvoir.

Photo: Tim Snow Photo The Cure au Centre Bell, vendredi

Si les chansons choisies et l’ordre dans lesquelles elles ont été présentées parvenaient à construire une lente et captivante tension, le concert ne s’est pas déroulé sans temps morts. Autant on appréciait redécouvrir quelques chansons rarement entendues sur scène (Three Imaginary Boys, tiens, ou encore Kyoto Song durant la première heure et demie), lancer le premier rappel avec une nouvelle chanson (I Can Never Say Goodbye) et une laissée-pour-compte réchappée sur une compilation (It Can Never Be the Same) n’annonçait pas une fin de concert des plus mémorables ; heureusement, The Cure s’est repris avec Plainsong et Disintegration, puis un second rappel nettement plus savoureux.

Ce dernier a commencé avec Lullaby (de Disintegration, encore !), deux plus anciennes encore (Six Different Ways et The Walk), puis les immortelles Friday I’m in Love et Close to Me. Pour la première fois de la soirée, le public s’est alors mis à danser ; ce concert de The Cure n’appelait pas au défoulement collectif, mais à une forme de bienveillante communion à vivre assis ou debout. Et debout tous au même moment encore pour Just Like Heaven et Boys Don’t Cry avant la tombée du rideau. The Cure remet ça samedi soir – parions que le groupe réservera aux fans le plaisir de réentendre Fascination Street et 10:15 Saturday Night.

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