Première baisse des taux d'intérêt en quatre ans

5 Jun 2024
Taux directeur

La Banque du Canada a procédé, mercredi, à une première baisse de ses taux d’intérêt qui était attendue.

À 5 % depuis le mois d’août dernier, le taux directeur de la banque centrale a été réduit d’un quart de point de pourcentage à 4,75 %. C’est la première baisse de son principal instrument de politique monétaire en plus de quatre ans et une étape qu’attendaient avec impatience les nombreux ménages et entreprises qui ont durement senti l’effet de la hausse des taux d’intérêt sur leurs prêts hypothécaires, leur capacité d’investissement et, plus généralement, la vigueur de l’économie tout entière.

Le taux cible du financement à un jour de la Banque du Canada vise directement ses prêts et dépôt à très court terme avec les institutions financières, mais finit rapidement par influencer l’ensemble des taux commerciaux de ces dernières, de leurs prêts hypothécaires aux prêts à la consommation en passant par les intérêts qu’elles versent à leurs déposants. Il est le principal moyen employé par la banque centrale pour influencer le comportement des consommateurs et des entreprises afin de remplir sa première mission qui consiste à garder l’inflation autour de sa cible de 2 %.

Il était temps

Le moment d’une première baisse du loyer de l’argent au Canada était arrivé, estimait, la semaine dernière, Royce Mendes, directeur général et chef de la stratégie macroéconomique au Mouvement Desjardins. Menée parallèlement à un resserrement des politiques monétaires de plusieurs autres pays, la forte hausse du taux directeur de la banque centrale canadienne depuis mars 2022 a si bien pesé sur la vigueur de l’économie que les pressions sur les prix sont revenues à la normale. L’inflation totale s’établit désormais à 2,7 %, son niveau le plus bas depuis mars 2021 et les principaux indicateurs d’inflation fondamentale sur lesquels s’appuie la Banque du Canada sont désormais bien à l’intérieur de sa fourchette cible de 1 % à 3 %.

C’est aussi l’avis des marchés financiers où l’on était deux sur trois à s’attendre à une réduction de 5 % à 4,75 % du taux directeur de la Banque, a observé vendredi l’économiste de la Banque CIBC, Avery Shenfeld. C’est la première baisse du genre depuis que le choc économique provoqué par la pandémie de COVID-19 a forcé une baisse d’un coup de 1,75 % à 0,25 % il y a un peu plus de quatre ans. Le taux de la banque centrale était resté à ce niveau plancher jusqu’à ce qu’une envolée surprise de l’inflation amène un renversement brutal de cap, le taux directeur de la Banque remontant à 5 % de mars 2022 au mois d’août dernier.

Baisse modeste et lente

Cette première baisse des taux d’intérêt devrait ensuite être suivie par d’autres, tout aussi modestes et qui pourraient être interrompues par des moments de pause, le temps d’en mesure l’effet et de suivre l’évolution de l’économie, a expliqué Avery Shenfeld.

«Le Conseil de direction a convenu que la politique monétaire n’avait plus besoin d’être aussi restrictive et a abaissé le taux directeur de 25 points de base, pour l’établir à 4,75 %», a déclaré le gouverneur de la Banque du Canada, Tiff Macklem. Nous avons fait beaucoup de progrès dans notre lutte contre l’inflation. Et notre con fiance que l’infl ation va continuer à se rapprocher de la cible de 2 % s’est renforcée ces derniers mois. Nous avons réalisé des progrès considérables pour rétablir la stabilité des prix, ce qui est une bonne nouvelle pour la population canadienne.»

S’il faut en croire la douzaine d’experts du Conseil de la politique monétaire de l’Institut C.D. Howe, le taux directeur de la Banque du Canada devrait ainsi être passé de 5 % à 4,25 % d’ici la fin de l’année, et se fixer aux alentours de 3,5 % dans un an.

L’une des choses qui pourraient faire hésiter la banque centrale canadienne à aller trop vite est que son homologue américaine, la Réserve fédérale, ne semble pas pressée de réduire son propre taux directeur actuellement dans la mince fourchette allant de 5,25 % et 5,5 %. Or, le chemin de la Banque du Canada s’éloigne rarement de celui de sa voisine. Plusieurs pensent notamment que c’est parce que des taux plus faibles au Canada amèneraient une dépréciation du dollar canadien ce qui se traduirait par une hausse du prix des importations et une augmentation des exportations, deux facteurs susceptibles de nourrir l’inflation. La recherche a toutefois montré que l’ampleur de ce phénomène est exagérée, dit Royce Mendes. De plus, le Banque du Canada ne serait pas seule avec ses baisses de taux, les banques centrales de Suisse et de Suède ayant déjà bougé en ce sens, et celles du Royaume-Uni et de l’Europe étant sur le point de le faire.

Dans une autre analyse publiée, les économistes du Mouvement Desjardins ont aussi prévenu qu’il ne faut pas exagérer le rebond des ventes et des prix des maisons qui pourrait venir avec la baisse des taux d’intérêt. C’est que l’économie et l’emploi resteront vraisemblablement moroses encore plusieurs mois, ont-ils expliqué lundi. De plus, il faudra du temps avant que la réduction des coûts d’emprunt se fasse sentir non seulement sur la croissance économique, mais aussi sur marché de l’habitation dont l’abordabilité « demeure très limitée dans la majeure partie du pays ».

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