Mort de Michel Blanc, clown triste du cinéma français

5 Oct 2024
Michel Blanc

L’acteur français Michel Blanc, figure du film populaire Les Bronzés, est décédé dans la nuit de jeudi à vendredi à 72 ans, a annoncé à l’AFP l’attaché de presse de ses principaux films, Laurent Renard, confirmant une information de Paris Match.

Il a fait un malaise cardiaque dans la soirée et a été transporté dans un état sérieux dans un hôpital parisien, a précisé son entourage à l’AFP.

« Putain Michel... Qu’est-ce que tu nous a fait… », a lancé en guise de condoléances sur Instagram l’acteur Gérard Jugnot, son comparse de la troupe phare du Splendid et des Bronzés.

« Michel, mon pote, mon frère, mon partenaire », a réagi sur Instagram la comédienne Josiane Balasko, une autre figure de ce groupe de comédiens des années 70-80.

Acteur populaire français, Michel Blanc a alterné le rire et l’émotion, explorant tout en finesse l’âme humaine, devant et derrière la caméra.

« On sait jamais, sur un malentendu, ça peut marcher… » Pour beaucoup, il restera à jamais Jean-Claude Dusse, le gringalet chauve et moustachu des Bronzés, film sorti en 1978 où il incarne un dragueur raté toujours persuadé de pouvoir « conclure » et dont les répliques sont passées à la postérité.

Gros succès puis carton encore plus énorme, un an plus tard, avec Les Bronzés font du ski, les deux films sont devenus cultes.

Des générations ont ri en entendant « Oublie que tu n’as aucune chance, vas-y, fonce ! On sait jamais, sur un malentendu ça peut marcher » ou encore « Éventuellement, si vous étiez au bout du rouleau, on pourrait envisager de conclure ? »

Ce personnage aussi exaspérant qu’attendrissant a un temps enfermé Michel Blanc dans des rôles d’hypocondriaque ou de maladroit.

Le comédien avait pourtant déjà fait ses preuves dès le milieu des années 1970 en tournant pour Bertrand Tavernier (Que la fête commence), Claude Miller (La Meilleure façon de marcher) ou Roman Polanski (Le Locataire).

« Tenue de soirée », le tournant

Après l’énorme succès public de Marche à l’ombre (1984), son premier film en tant que réalisateur, le comédien sait finalement rebondir et élargir son registre.

Il est le premier à s’éclipser de la bande du « Splendid », du nom de ce café-théâtre parisien fondé avec des copains de lycée et pépinière d’acteurs devenus célèbres.

Et fait exploser le « plafond de verre » grâce au transgressif Tenue de soirée (1986) du réalisateur Bertrand Blier.

Il y incarne l’émouvant Antoine, qui s’entiche de Gérard Depardieu et se travestit. Le rôle, couronné du prix d’interprétation masculine à Cannes, marque un tournant dans sa carrière.

Né le 16 avril 1952 à Courbevoie (Hauts-de-Seine), Michel Blanc vient d’un milieu plutôt modeste, avec un père déménageur qui finira cadre moyen et une mère dactylo devenue comptable. Des parents très aimants qui surprotègent ce fils unique, né avec un souffle au coeur.

Timide, chétif, grand hypocondriaque — « je suis le pionnier du gel hydroalcoolique ! » -, le jeune Michel perd vite ses cheveux et va miser davantage sur l’autodérision et l’humour, parfois caustique, que sur son physique.

« Je ne m’aimais pas »

« J’ai un avantage sur les chauves tardifs, je n’ai jamais associé la calvitie à l’âge », plaisantait celui qui a longtemps été mal dans sa peau.

Dès l’enfance, il se passionne pour la musique classique. À 20 ans, il tente même de faire carrière comme pianiste. Il y consacre six à sept heures par jour mais renonce assez vite, comprenant qu’il ne sera jamais « le nouvel Arthur Rubinstein ».

Changement de cap avec l’aventure du Splendid, où il rejoint sa bande de copains du lycée de Neuilly, Gérard Jugnot, Thierry Lhermitte et Christian Clavier.

« Comme je ne m’aimais pas, j’avais envie de jouer des personnages qui n’étaient pas moi ».

« C’est un homme solitaire, blessé, déconcerté », disait son amie, l’écrivaine Françoise Sagan. « Je suis un anxieux qui préfère l’action à la dépression », précisait l’intéressé.

Tout au long de sa carrière, menée également au théâtre, ce gros bosseur, perfectionniste, sait d’ailleurs utiliser ses complexes et son talent d’écriture pour explorer le désenchantement et façonner les personnages de ses films, notamment ceux qu’il réalise comme Grosse Fatigue (1994) et Embrassez qui vous voudrez (2002).

Il se montre convaincant dans le registre dramatique, en campant l’inquiétant Monsieur Hire (1989), d’après Simenon, ou un médecin homosexuel au début du sida dans Les Témoins (2007) d’André Téchiné. Ou encore à la télévision dans L’Affaire Dominici (2003).

Après le rendez-vous raté du troisième opus des Bronzés en 2006, Michel Blanc, nommé quatre fois au César du meilleur acteur, remporte en 2012 la précieuse statuette pour son second rôle inattendu de directeur de cabinet dans le thriller politique L’Exercice de l’État.

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