France : Michel Barnier nommé premier ministre, annonce l'Élysée

13 days ago
Michel Barnier

Le président français Emmanuel Macron a nommé jeudi l'ex-ministre et ancien commissaire européen de droite Michel Barnier, 73 ans, comme premier ministre, a annoncé l'Élysée, 60 jours après des législatives qui ont débouché sur une Assemblée nationale dépourvue de majorité en France.

Le plus vieux premier ministre de la Ve République succède ainsi au poste de chef du gouvernement à Gabriel Attal, 35 ans, qui en était le plus jeune.

Doté d'une solide expérience politique en France comme à Bruxelles, Michel Barnier est réputé bon médiateur : il a été le négociateur en chef de l'Union européenne pour le Brexit lorsque le Royaume-Uni a quitté le bloc continental. Avant cela, il a été ministre à plusieurs reprises depuis 1993, notamment sous les présidences de Jacques Chirac et de Nicolas Sarkozy.

Il devra désormais user de toutes ses qualités diplomatiques pour former un gouvernement susceptible d'échapper à la censure parlementaire et mettre fin à la plus grave crise politique de ces 50 dernières années.

Une tâche aux allures de mission impossible, tant aucune coalition viable n'a jusqu'ici émergé. L'Assemblée issue des législatives de juillet est fragmentée en trois blocs, la gauche, le centre droit et l'extrême droite.

En attendant, les ministres démissionnaires vont eux rester en fonctions pour continuer de gérer les affaires courantes, le temps de négociations avec les partis que beaucoup prédisent longues et difficiles.

Pas de censure immédiate de l'extrême droite

Le patron du principal parti d'extrême droite français Jordan Bardella a assuré jeudi que sa formation [jugerait] sur pièces le discours de politique générale du nouveau premier ministre, avant de se déterminer sur une éventuelle censure de son gouvernement.

Nous plaiderons pour que les urgences majeures des Français, le pouvoir d'achat, la sécurité, l'immigration, soient enfin traitées et nous nous réservons tout moyen politique d'action si ce n'était pas le cas dans les prochaines semaines, a-t-il déclaré sur X (ex-Twitter), peu après la nomination de l'ex-commissaire européen de droite Michel Barnier comme chef du futur gouvernement.

La gauche dénonce une élection volée et une crise de régime

L'élection a été volée aux Français, a dénoncé le chef de la gauche radicale Jean-Luc Mélenchon après la nomination de l'ex-commissaire européen de droite Michel Barnier comme premier ministre, tandis que le patron des socialistes Olivier Faure a estimé que le pays entrait dans une crise de régime.

Dans une vidéo postée sur les réseaux sociaux, M. Mélenchon a fustigé le choix de M. Barnier, décrit comme la personnalité la plus proche des positions de l'extrême droite et appelé à la mobilisation la plus puissante que possible samedi, jour où la gauche avait prévu des manifestations contre le président Emmanuel Macron.

M. Faure décrit de son côté sur X un déni démocratique porté à son apogée : un premier ministre issu du parti qui est arrivé en 4e position aux élections législatives, en référence au parti de droite Les Républicains (LR).

Une longue carrière politique

Applaudi à Bruxelles pour ses qualités de négociateur, au point que son nom avait circulé pour succéder à Jean-Claude Juncker en 2019 à la tête de la Commission européenne, ce membre du parti de droite Les Républicains (LR), originaire des Alpes françaises, s'est forgé une réputation de pragmatique.

C'est un homme d'État. Un homme de consensus et de négociation comme il l'a prouvé lors des négociations du Brexit, ce qui est indispensable dans la période que nous connaissons, affirme à l'AFP le député LR Vincent Jeanbrun, persuadé qu'il parviendra à rassembler bien au-delà de son camp. L'Assemblée issue des législatives de juillet est fragmentée en trois blocs, la gauche, le centre droit et l'extrême droite.

La sénatrice LR Agnès Evren salue pour sa part une méthode Barnier qui allie respect de son interlocuteur et solidité des convictions.

Des qualités qui ont certes séduit Emmanuel Macron, à la recherche d'une personnalité capable de déjouer une majorité de censure à l'Assemblée, mais qui ont pour l'instant été plus applaudies à Bruxelles qu'en France, et même dans sa famille politique des Républicains.

Il représente tout ce que les Français ne veulent pas. Il est stratosphérique, déconnecté et il continuera ou finira de tuer la droite, déplore un parlementaire LR auprès de l'AFP.

Il a d'ailleurs mordu la poussière en 2021 dès le premier tour des primaires de LR pour désigner le candidat de la droite à la présidentielle de 2022.

Longtemps positionné sur une ligne centriste du gaullisme, Michel Barnier avait alors amorcé un virage droitier inattendu, plaidant notamment pour un moratoire de trois à cinq ans sur l'immigration, sans pour autant parvenir à convaincre les militants.

Vieux loup de la politique française, il entre en politique en 1973. Une longue carrière qui fait dire au député d'extrême droite Jean-Philippe Tanguy qu'il est fossilisé de la vie politique.

Des décennies à arpenter les allées du pouvoir, à Paris comme à Bruxelles, où cet homme à la haute stature et à la chevelure blanchie s'est forgé la réputation d'écouter, d’argumenter et de chercher à convaincre.

Derrière un air lisse se cache une personnalité torturée. C'est un inquiet et il a besoin d'être conseillé. Il tire sa force d'une équipe de collaborateurs en qui il a une totale confiance, explique un de ses proches.

Michel Barnier a siégé dans plusieurs gouvernements de droite en France dans les années 1990 et 2000, avec des portefeuilles variés (Affaires européennes, Environnement, Agriculture, Affaires étrangères, entre autres), a été commissaire européen à deux reprises, chargé des politiques régionales et du cadre financier (1999-2004), puis responsable du Marché intérieur et des Services (2009-2014).

Marié et père de trois enfants, il rappelle volontiers qu'il est un montagnard, manière de marquer sa différence : ne pas faire partie du sérail parisien et ne pas sortir de la prestigieuse école de l'élite ENA mais, dans son cas, de l'École supérieure de commerce de Paris.

À Bruxelles, dans son bureau, il montrait volontiers à ses visiteurs une photo où il pose aux côtés du triple champion olympique de ski Jean-Claude Killy, avec qui il a mené à bien l'organisation des Jeux olympiques d'hiver 1992 dans sa ville d'Albertville.

Une autre le montrait lors de la libération de la journaliste Florence Aubenas, otage en Irak, obtenue alors qu'il dirigeait le Quai d'Orsay.

Sa carrière européenne n'a pas toujours été couronnée de succès. Jean-Claude Juncker l'a battu en 2014 dans la course à la présidence de la Commission européenne lors du congrès du Parti populaire européen (PPE, droite).

Sa nomination comme négociateur du Brexit en 2016 lui a cependant permis de rebondir et de peaufiner sa stature internationale.

Nous aurions pu avoir bien pire que le pragmatique et expérimenté Barnier, avait commenté Syed Kamall, chef de la délégation du parti conservateur britannique au Parlement européen.

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