Dans un discours qu'il n'aurait jamais voulu prononcer, Biden passe ...

27 days ago
Joe Biden

Dans un discours aux allures de testament politique dans lequel il a longuement défendu son legs, Joe Biden s’est rangé derrière Kamala Harris lundi soir, au premier jour de la convention démocrate à Chicago.

Je promets d'être le meilleur bénévole que la campagne de Harris et Walz ait jamais connu, a laissé tomber l’actuel président devant une foule conquise dans la Ville des Vents, affirmant que sa vice-présidente était la mieux placée pour gouverner le pays aux côtés de son colistier Tim Walz.

Elle est coriace, elle a de l’expérience et elle fait preuve d'une grande intégrité, a-t-il lancé. Puis de confier que la décision de l’avoir choisie comme vice-présidente en 2020 a été la meilleure de toute sa carrière, longue de plus de 50 ans.

Surtout, Joe Biden n’est pas en colère. Pas plus qu’il n'en veut aux démocrates qui lui ont publiquement enjoint de quitter la course à la présidence le mois dernier. J'aime davantage mon pays [que mon poste de président] et nous devons préserver notre démocratie.

Joe Biden a annoncé le 21 juillet qu’il se retirait de la course à la présidence, provoquant un coup de tonnerre politique aux États-Unis. Cette décision a mis fin à des semaines d'incertitude sur son avenir politique après un premier débat présidentiel désastreux contre son rival Donald Trump.

Aucun président en exercice n’avait jamais annoncé si tard qu’il se retirait de la course.

La campagne de Joe Biden était plombée par les inquiétudes sur son âge, son acuité mentale et sa forme physique. D’après les sondages, ses chances étaient minces de l’emporter sur Donald Trump le soir du 5 novembre.

Lundi soir, le politicien octogénaire s’est permis une pointe d’humour à ce sujet. J'étais trop jeune pour siéger au Sénat parce que je n'avais pas encore 30 ans, et je suis trop vieux pour rester président, a dit celui qui a été élu sénateur du Delaware en 1973 à l’âge de 29 ans.

Une vague d’amour

Dans un discours énergique de près d’une heure, Joe Biden a vanté les bons coups de son administration. Il s’est félicité du faible taux de chômage, des millions de nouveaux emplois créés et de la lutte qu’il a menée contre les grandes compagnies pharmaceutiques, enjolivant parfois la réalité.

Il a aussi mis en garde les électeurs contre un éventuel retour de Donald Trump à la Maison-Blanche. Nous sommes dans une bataille pour l'âme même de l'Amérique, a-t-il argué, reprenant en substance un avertissement qu’il a déjà lancé par le passé.

Le président a été le dernier orateur de cette soirée pendant laquelle il a été la vedette sans conteste. De nombreuses figures du parti – connues et moins connues du public – se sont succédé au micro pour le remercier et vanter son sens du devoir.

Il a été le champion de la démocratie dans son pays et sur la scène internationale, a notamment soutenu Hillary Clinton, ancienne secrétaire d’État et candidate défaite à la présidence en 2016. Dans la foule, bon nombre de délégués brandissaient des pancartes sur lesquelles on pouvait lire : On t’aime Joe, dont l’ex-présidente de la Chambre des représentants, Nancy Pelosi, en froid avec le président pour l’avoir poussé à jeter l’éponge.

On sait que cette soirée était minutieusement orchestrée, mais les organisateurs ont rendu tout ça crédible en jouant habilement avec les émotions. Les gens avaient les yeux brillants, analyse en entrevue Charles-Étienne Beaudry, chargé de cours en science politique à l’Université d’Ottawa.

Un vent de fraîcheur

Avant de monter sur scène, le président a été précédé au micro par sa conjointe Jill et sa fille Ashley. Les deux femmes n'ont pas lésiné sur les anecdotes, présentant Joe Biden en père affectueux et politicien combatif. Quand son tour est venu, le principal intéressé a pris sa fille dans ses bras, avant de recevoir une ovation assourdissante de trois minutes et demie.

Merci, merci, merci, a-t-il répété, portant à quelques reprises un mouchoir à son nez.

Joe Biden a été acclamé comme une légende vivante. On lui donne une aura étant donné qu’il s’est retiré de la course, observe Charles-Étienne Beaudry, qui a signé le livre Radio Trump : Comment il a gagné la première fois.

De l’autre côté, le Parti démocrate met le paquet pour alimenter l’impression de renouveau qu’incarne Kamala Harris auprès des électeurs, ajoute le politologue. C’est une femme plus jeune, issue de la diversité, qui incarne des valeurs progressistes et qui pourrait marquer l’histoire. On crée autour d’elle un mythe qui peut ressembler à celui de Barack Obama en 2008, résume M. Beaudry.

D’ailleurs, le choix des orateurs lundi témoignait d’une volonté des organisateurs de refléter ce changement de garde. Des figures plus à gauche ont pris la parole, dont la représentante de New York Alexandria Ocasio-Cortez et le président du syndicat United Automobile Workers, Shawn Fain.

La réussite à partir de rien, c’était vraiment central pendant la soirée. On tablait sur les contrastes avec les républicains. Trump est né avec une cuillère d'argent dans la bouche, alors que Kamala Harris a travaillé au McDonald's, note Charles-Étienne Beaudry.

Sur le fond, la défense de la classe moyenne a occupé une place centrale dans le discours des personnalités appelées au micro. Tout comme le droit à l’avortement, malmené dans une vingtaine d’États américains depuis que la Cour suprême a infirmé l’arrêt Roe c. Wade en 2022.

La guerre menée par Israël à Gaza s’est aussi invitée à la convention. La journée a été marquée par des manifestations propalestiniennes aux abords du United Center de Chicago.

Nous travaillons sans relâche pour empêcher une guerre plus étendue, pour réunir les otages avec leurs familles et pour acheminer une aide humanitaire à Gaza dès maintenant, a déclaré le président Biden, se disant déterminé à mettre fin aux souffrances du peuple palestinien et à conclure un cessez-le-feu pour stopper cette guerre.

En somme, le Parti démocrate est apparu uni et plus rafraîchi que jamais, relève M. Beaudry. Et cela, alors qu’il y a quelques semaines à peine, la formation était profondément divisée sur la politique étrangère, sur la stratégie politique pour décrocher les clés du bureau ovale et sur M. Biden lui-même.

Cela étant, les attaques contre Donald Trump se sont faites trop nombreuses, juge l’expert. Donald Trump est dépeint comme le vilain des vilains. Et diaboliser ainsi l’homme n’a pas toujours été garant de succès par le passé, a ajouté M. Beaudry.

Avec les informations de l'Associated Press, de l'Agence France-Presse, de CNN et du New York Times

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