Jagmeet Singh justifie son retrait en attaquant Pierre Poilievre

5 Sep 2024

(Ottawa) Le divorce politique entre le NPD de Jagmeet Singh et le Parti libéral de Justin Trudeau est des plus acrimonieux, donnant l’impression qu’une campagne électorale est déjà en cours tant les attaques et les contre-attaques fusent entre les deux partis moins de 24 heures après la rupture de l’entente de soutien qui permettait au gouvernement libéral minoritaire de survivre aisément à la Chambre des communes.

Jagmeet Singh - Figure 1
Photo La Presse

Publié à 11h45 Mis à jour à 13h10

Prenant la parole pour la première fois à Toronto depuis qu’il a causé une certaine commotion en déchirant cette entente conclue en mars 2022, Jagmeet Singh a multiplié les flèches contre les libéraux de Justin Trudeau tout en écorchant le Parti conservateur de Pierre Poilievre durant une conférence de presse devant des militants néo-démocrates qui avait toutes les allures d’un évènement partisan.

De passage à Bromont afin de participer à la rencontre du caucus libéral du Québec, le premier ministre Justin Trudeau a soutenu que le NPD va payer un prix politique en posant un tel geste.

« J’espère que le NPD va garder la priorité sur comment on peut continuer à livrer pour les Canadiens. Je comprends qu’ils veulent jouer des jeux politiques. Mais il ne faut pas laisser la politique interférer avec les Canadiens », a lancé le premier ministre durant une courte mêlée de presse.

La ministre du Patrimoine, Pascale St-Onge, s’est montrée plus caustique. Elle a accusé Jagmeet Singh de renier son engagement, et de se plier à la demande du chef du Parti conservateur, Pierre Poilievre, formulée la semaine dernière, de déchirer l’entente.

M. Singh démontre dans le fond qu’il est prêt à revenir sur sa parole. C’est un message qu’il envoie à tous les Canadiens. Pierre Poilievre lance un appel à déchirer l’entente et il s’exécute à peine quelques jours plus tard. Ça envoie effectivement un drôle de message aux Canadiens.

Pascale St-Onge, ministre du Patrimoine

Mais Jagmeet Singh n’en démord pas. À Toronto, il a fait valoir qu’il n’était plus possible de maintenir l’entente de soutien qui devait prendre fin en juin 2025. « Justin Trudeau a prouvé à maintes reprises qu’il n’est pas capable de se tenir debout devant les PDG des grandes entreprises. Et les gens en paient le prix chaque fois qu’ils paient leurs factures, font l’épicerie ou paient leur loyer. Justin Trudeau a abandonné les Canadiennes et Canadiens. Les gens en ont assez de ses déceptions et de ses promesses brisées ».

Le chef du NPD a par la suite multiplié les attaques contre les conservateurs, se présentant aussi au passage comme le meilleur rempart contre l’inévitable austérité advenant l’élection de Pierre Poilievre aux prochaines élections.

« Il va couper le financement en santé et vous devrez payer pour voir un médecin. […] Il veut sacrifier l’avenir de nos enfants pour que les grandes pétrolières puissent faire plus d’argent. Et il va laisser les PDG s’enrichir sur le dos des travailleurs et de leurs familles », a-t-il dit.

PHOTO CARLOS OSORIO, REUTERS

Jagmeet Singh

L’avenir que veut Poilievre est petit et mesquin. Mais les Canadiens ne le sont pas. La vie est devenue trop épuisante et trop chère pour trop de familles.

Jagmeet Singh, chef du NPD

Interrogé pour savoir ce qui a motivé sa décision de déchirer l’entente avec les libéraux, le chef néo-démocrate est resté évasif. Il s’est contenté de répéter que le gouvernement de Justin Trudeau favorise les intérêts des PDG aux dépens des Canadiens.

Chaque vote évalué au cas par cas

L’entente de soutien et de confiance du NPD avec les libéraux, qui devait durer jusqu’en juin 2025, assurait à Justin Trudeau l’appui du parti d’opposition dans tout vote de confiance susceptible de faire tomber le gouvernement minoritaire.

En échange, les libéraux promettaient d’accomplir une série de choses chères aux néo-démocrates, comme le lancement d’un programme d’assurance médicaments.

M. Singh n’a pas voulu dire comment les néo-démocrates entendent voter sur une éventuelle motion de censure que prévoient déposer les conservateurs. L’adoption d’une motion de censure signifie que le gouvernement a perdu la confiance de la Chambre et cela mène au déclenchement d’une campagne électorale.

Le chef du NPD a affirmé que chaque vote sera évalué au cas par cas en fonction de ce qui est dans l’intérêt des Canadiens. « Je ne peux pas deviner quand une date d’élection va arriver », a-t-il offert comme réponse.

Pour le reste, il a contourné chaque question sur le sujet en soulignant que la fin de l’entente de soutien et de confiance augmente les probabilités d’une élection.

Plusieurs éléments de l’entente ont été mis en œuvre durant les plus de deux ans qu’aura duré l’entente, comme l’adoption d’une loi anti-briseurs de grève et la mise en place d’une assurance dentaire. D’autres points de l’entente n’ont pas mené à des réalisations.

Dans le cas de l’assurance médicaments, un projet de loi qui est à l’étude au Sénat se veut une première étape. Si elle est adoptée, la mesure législative doit permettre la couverture de contraceptifs et de médicaments utilisés pour traiter le diabète. Des négociations avec les provinces seront nécessaires.

« Si l’un des programmes ne va pas de l’avant, ce sera la faute de Justin Trudeau. […] Si [les libéraux] échouent à livrer, nous finirons le travail lorsque je serai premier ministre », a dit M. Singh.

Les travaux de la Chambre des communes doivent reprendre le 16 septembre.

Avec La Presse Canadienne

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