Gaël Monfils, après son succès contre Baez : « Top 1-top 2 des plus ...
Gaël Monfils rigole en regardant son entraîneur Mikael Tillström, à la toute fin du match. (S. Boué/L'Équipe)
Victor Lengronne et David Loriot mis à jour le 31 mai 2023 à 03h31
« À quelle place situez-vous cette victoire épique face à Sebastian Baez dans votre carrière ?
Top 1 - top 2 avec le match contre (Pablo) Cuevas sur Le Lenglen (au 3e tour de Roland-Garros 2015, victoire de Monfils, 4-6, 7-6 [1], 3-6, 6-4, 6-3), l'atmosphère était incroyable. Ce soir, les émotions étaient incroyables, le public était exceptionnel. C'était ma première night-session ici, j'ai fait quatre night sessions dans les quatre Grands Chelems, je l'ai même fait à Wimbledon, n'oubliez jamais avec Gilles Simon sur le Central (en 2015, victoire de Simon, 3-6, 6-3, 7-6, 2-6, 6-2), on l'a fait notre petite night session. L'avoir fait ici, j'ai rempli ma bucket list et en plus j'ai gagné.
Quel est votre premier sentiment après un tel match ?
J'ai vécu un truc de dingue ce soir. J'oublie où je suis, que c'était un premier tour. Je savais que ça allait être très très dur, je me suis entraîné avec lui la semaine dernière, je le trouvais monstrueux. Quand j'ai vu le tableau, je n'étais pas très content, ce n'était pas le gameplay que je voulais vraiment au premier tour. Une fois que t'es dedans, t'acceptes. Avoir réussi à trouver des solutions inespérées, je suis juste très content, c'est un des meilleurs moments de sport que j'ai pu vivre.
« Je suis dans le mix où je suis hyper content d'avoir gagné mon jeu, j'ai mis deux bons coups droits, il y a un monde où je me dis qu'on va essayer de faire quelque chose »
Vous disiez avant le tournoi vouloir « kiffer ». Est-ce que ça n'a pas été plus que ça ?
J'ai kiffé, je ne m'attendais pas du tout à ça, même pouvoir rebondir sur certains choix tactiques, sur certaines choses. Je lâche le quatrième parce que je suis fatigué, parce que je suis mort. Je sens que je n'en peux plus. Je dis à Mikael (Tillström, son entraîneur) que j'ai besoin de 10 minutes. J'ai eu besoin de 25 minutes ! C'est fou parce que tu le fais inconsciemment. On peut penser que c'est une bêtise, mais finalement, tu le fais très consciemment, parce que tu as une certaine sérénité, chose que je n'ai pas du tout en ce moment. À Roland-Garros, j'ai réussi à me dire, ''Je vais récupérer et je vais le niquer dans le cinquième''. T'imagines le malade que je suis. Je me suis dit que si je fais le contraire et que je perds 6-4 le quatrième set, je perds 6-1 au cinquième. Si ça ne passe pas pour X raisons, je suis mort. Le fait est que ça a été un choix payant.
Qu'est-ce que vous vous dites quand vous êtes mené 4-0 au cinquième set, balle de 5-0 pour Baez ?
Je n'avais pas envie de prendre 6-0 au cinquième, il n'y que (Andy) Murray qui me l'a foutu (6-4, 6-1, 4-6, 1-6, 6-0 pour Murray en quarts en 2014) . J'avais envie de gagner un jeu au moins et inconsciemment, je me dis que si j'arrive à pousser, il y a un monde où il y a le vent de l'autre côté avec moi, on ne sait pas... Et je suis dans le mix où je suis hyper content d'avoir gagné mon jeu, j'ai mis deux bons coups droits, il y a un monde où je me dis qu'on va essayer de faire quelque chose.
« Cette blessure m'a fait plus mal que d'habitude parce que je n'ai pas pu courir, faire des activités en dehors, basket, padel. Là, rien, j'étais à l'arrêt total. Et à un certain âge, ça coince un petit peu quand on recommence »
Quand vous boitez à la toute fin, c'était du cinéma ?
On peut dire qu'on peut faire du cinéma de temps en temps, mais là, j'ai mal. C'est là où on nous appelle sportifs de haut niveau. J'ai des crampes assez hautes, super hautes dans le quadri. L'amorti (dans le dernier jeu) m'a fait très mal, je gagne le point, je regarde Mikael (Tillström), je rigole parce que j'ai mal.
Gaël Monfils, à la fin de son match contre Sebastian Baez. (S. Boué/L'Équipe)
C'est votre première victoire sur le circuit principal depuis votre retour sur le circuit cette saison, vous pouviez difficilement rêver mieux ?
Quand je suis revenu sur le circuit, je me suis dit, j'attends Roland-Garros, je gagnerai mon premier match, c'est sûr (sourire). Non, honnêtement, je ne m'attendais même pas à gagner ce match. Ce n'est que du bonus, du positif. Mon but, c'est d'être en forme pour tenir justement des matches comme ça, de meilleure façon encore, sans avoir un gros drop (passage à vide). Pouvoir tenir à nouveau des matches à tension. Ces dernières semaines, j'ai bien travaillé, j'ai senti que, même en perdant beaucoup de matches, j'ai pu enchaîner tournois, entraînements et ça m'a fait du bien. J'ai repris confiance dans mon corps. Quand tu as soigné la blessure au pied, après il y a tout le reste, l'appréhension, reprendre les appuis, l'oeil, les bons choix au bon moment, se ressentir puissant...
Cette blessure m'a fait plus mal que d'habitude parce que je n'ai pas pu courir, faire des activités en dehors, basket, padel. Là, rien, j'étais à l'arrêt total. Et à un certain âge, ça coince un petit peu quand on recommence. Et puis, il y a aussi, pour la première fois, l'appréhension. À Montréal (en août dernier, lorsqu'il abandonne contre Jack Draper), je me suis fait super mal et on a toujours dans nôtre tête forcément, quand on a une blessure importante, cette petite appréhension. Le vrai premier match où je suis bien rentré dedans, c'était contre Ugo (Humbert à Miami, avant qu'il ne se blesse au poignet). Sur le fait de courir à nouveau, sans appréhension, le match à Lyon la semaine dernière (face à Pedro Cachin, défaite 2-6, 6-3, 6-4) m'a fait beaucoup de bien.
Vous avez vraiment pensé à votre fille quand vous étiez proche de la défaite dans le cinquième set ?
Tu penses à tout et à rien de temps en temps, je n'ai pas de chance, j'ai toujours pas gagné, Elina (Svitolina, sa femme) a gagné son premier tournoi (à Strasbourg, samedi), moi je n'ai pas gagné un match (depuis son retour, en mars). Je ne sais pas pourquoi je me suis dit ça, je voulais le faire pour elle et pour mon père. C'était important pour ces deux personnes-là. Je l'ai fait, je suis content.
« Ce sont des combats que je recherche, c'est pour ça que je continue à jouer. Je commence à être de mieux en mieux et quand je serai bien avant de partir, j'ai envie de les faire trembler ces petits top 10 »
Êtes-vous surpris de vous ?
Je me suis forcément surpris, je ne m'attendais pas forcément à pouvoir tenir ce niveau-là, à pouvoir élever mon niveau à certains moments, à pouvoir bien jouer les moments importants, gérer un peu de pression. C'était une grosse surprise pour moi.
Gaël Monfils s'est arraché pour venir à bout de Sebastian Baez. (S. Boué/L'Équipe)
Votre prochain adversaire est Holger Rune. Comment allez-vous aborder ce match ?
Ça va être un gros match, un top 10, jeune (20 ans), qui se déplace hyper bien, en confiance. Je vais déjà essayer de bien récupérer, de bien analyser ses derniers matches. Ça va être à moi de trouver des solutions, des ressources pour essayer de l'embêter. Je ne pars pas défaitiste mais je pars assez réaliste qu'après un gros match comme ça, je ne suis pas favori. S'il y a des opportunités, je vais essayer de bien les saisir. Je vais essayer de me tirer une bonne bourre, c'est cool de jouer un top 10, d'avoir cette chance-là encore une fois.
Ce qui est terrible, c'est que je sais que je vais avoir mal, mais c'est pour ça qu'on fait du sport. Si je veux gagner ce match, il va falloir que je me fasse mal et je suis prêt à me faire mal. J'espère trouver une solution et s'il n'y en a pas, ce sera bien joué à lui et je m'entraînerai pour trouver une autre solution pour le battre dans quelques mois.
Ce sont des combats que je recherche, c'est pour ça que je continue à jouer. Je commence à être de mieux en mieux et quand je serai bien avant de partir, j'ai envie de les faire trembler ces petits top 10.
Y a-t-il encore de l'essence dans le réservoir ?
Là, non. Mais jeudi, j'espère un peu et après il faut y aller au panache, à l'expérience et la magie du sport, on ne sait jamais. »
publié le 31 mai 2023 à 02h32 mis à jour le 31 mai 2023 à 03h31
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