(Saint-Denis) Dans un stade qui sonne creux, le coup d’envoi du match de football France-Israël a été donné jeudi soir au Stade de France, au nord de Paris, où un dispositif sécuritaire exceptionnel a été mis en place dans un climat tendu après les violences de la semaine dernière en marge d’un match du Maccabi Tel-Aviv à Amsterdam.
Publié à 12 h 10 Mis à jour à 15 h 13
Laurence BOUTREUX et Shahzad ABDUL Agence France-Presse
Des fans de l’équipe visiteuse étaient disséminés un peu partout dans le stade, avec des drapeaux israéliens. Leur hymne national a déclenché quelques sifflets épars d’une partie du public.
L’enjeu sportif de ce rendez-vous en banlieue parisienne comptant pour la Ligue des nations est largement éclipsé par le contexte géopolitique.
Le président français Emmanuel Macron a assuré son homologue israélien Isaac Herzog et le premier ministre Benyamin Nétanyahou de la « mobilisation de la France » pour un « bon déroulement du match ».
La sécurisation du match est devenue une problématique majeure alors que l’Europe fait face à une montée des actes racistes et antisémites depuis le début de la guerre entre Israël et le mouvement islamiste palestinien Hamas à Gaza en octobre 2023.
PHOTO FRANCK FIFE, AGENCE FRANCE-PRESSE
Des policiers en discussion à l’extérieur du Stade de France.
Un total de 4000 policiers et gendarmes seront déployés autour et, fait rare, dans le stade de Saint-Denis, ainsi que dans les transports en commun et dans Paris.
Elisa, une Lilloise de 23 ans venue en famille et qui ne donne pas son nom, juge que l’omniprésence policière aux abords du stade ne « gêne pas ». Elle est même souhaitable selon elle, « parce qu’il y a un risque que des personnes violentes viennent perturber le match ».
L’enceinte de Saint-Denis (80 000 places) sonnera un peu creux puisque de 12 000 à 25 000 spectateurs seulement sont attendus, soit la plus faible affluence de l’histoire de ce stade pour un match de football (36 842 spectateurs pour France-Nouvelle Zélande en 2003).
La circulation piétonne sur le parvis de l’enceinte, inhabituellement désert, était très fluide, avec très peu de drapeaux français et israéliens visibles.
« Ça gâche un peu la fête parce que du coup il n’y aura que 15 000 personnes au lieu de 80 000 et il n’y aura pas trop d’ambiance », a regretté Matthieu Magron, supporter de l’équipe de France avant de faire scanner son billet près de l’enceinte.
Dans le stade, seuls les drapeaux français et israélien sont autorisés, et les bannières palestiniennes, de même que « les messages à caractère politique », seront interdits, a indiqué Laurent Nuñez.
Les premiers rangs de sièges sont recouverts d’une bâche pour prévenir toute intrusion et des grilles ont été dressées au-dessus des panneaux publicitaires sur tout le pourtour du terrain.
Les craintes de débordements ont été renforcées après les graves incidents qui ont suivi la rencontre de Ligue Europa entre l’Ajax et le Maccabi Tel-Aviv, dans la nuit du 7 au 8 novembre à Amsterdam.
« On est là pour Israël »Des supporteurs israéliens avaient été pourchassés et battus dans les rues de la capitale néerlandaise, des attaques qui ont fait de 20 à 30 blessés et suscité l’indignation de nombreuses capitales occidentales. Avant le match, des fans du Maccabi avaient scandé des chants anti-arabes et brûlé un drapeau palestinien sur la place centrale du Dam.
Les autorités françaises ont catégoriquement exclu de renoncer au match, ou de le délocaliser comme l’avait fait la Belgique en septembre.
PHOTO GONZALO FUENTES, REUTERS
Plusieurs personnalités politiques assistent au match, y compris Emmanuel Macron et ses deux prédécesseurs, Nicolas Sarkozy et François Hollande.
Israël a appelé dimanche ses fans à éviter de se rendre au Stade de France. Le chef de la diplomatie israélienne Gideon Saar a demandé jeudi soir aux autorités françaises d’assurer « la sécurité des supporters israéliens ».
Emmenées par une association de défense de la communauté juive, plus de 600 personnes se sont rendues jeudi en début de soirée au stade dans une dizaine de bus affrétés et placés sous haute sécurité policière.
« On n’est pas là pour le foot, on est là pour Israël, il faut soutenir l’équipe israélienne », a affirmé Jean-Philippe Sirois devant un des bus.
En plus des forces de l’ordre, environ 1600 agents de sécurité seront mobilisés au Stade de France et le RAID, l’unité d’élite de la police nationale, est engagé pour la sécurité de l’équipe d’Israël.
Les autorités prévoient la sécurisation des lieux de culte et communautaires juifs à Paris et en banlieue proche, selon une note de la préfecture de police (PP) consultée par l’AFP.
La PP demande aussi aux forces de l’ordre une vigilance accrue dans des lieux où des « supporters (de la sélection israélienne) seraient susceptibles de se déplacer », notamment dans des restaurants casher de l’ouest de la capitale.
Sur une place de la ville de Saint-Denis, plusieurs centaines de personnes étaient rassemblées jeudi soir pour dénoncer la tenue de ce match.
« Notre objectif est de dénoncer l’impunité d’Israël […]. On ne croit pas qu’on peut tranquillement jouer sur un terrain de foot, d’un côté, et continuer à bombarder, de l’autre », a dénoncé au micro Neva Bekhtari, du collectif Urgence Palestine.