Débat Harris-Trump | Les bons et moins bons coups

6 days ago
Debat Trump Harris

Nos chroniqueurs Yves Boisvert, Laura-Julie Perreault, Alexandre Sirois et Isabelle Hachey décortiquent en six temps le débat entre la démocrate Kamala Harris et le républicain Donald Trump.

La meilleure réplique Yves Boisvert

« De toute évidence, je ne suis pas Joe Biden. » Harris se distancie de sa propre administration, ce qui n’est pas évident – le meilleur moment de Trump étant sa finale : toutes vos belles promesses, pourquoi ne les avez-vous pas mises en œuvre depuis trois ans et demi ?

Laura-Julie Perreault

« Donald Trump a été mis à la porte par 81 millions de personnes. Il a vraiment du mal à avaler ça ! », a dit Kamala Harris en riant après un échange sur les résultats de l’élection de 2020, que Donald Trump conteste toujours.

Alexandre Sirois

Chaque fois que Trump a répliqué aux promesses de Kamala Harris en lançant : « Pourquoi ne l’a-t-elle pas fait ? » C’est la plus grande des faiblesses de la candidate démocrate. Comment peut-elle offrir une « nouvelle voie » de façon crédible alors qu’elle fait partie de l’administration actuelle à Washington ?

Isabelle Hachey

« Donald Trump a été mis à la porte par 81 millions de personnes. Il a vraiment du mal à avaler ça ! » Kamala Harris a réussi à arracher un sourire – de dépit – à Donald Trump avec cette allusion au fameux « Vous êtes viré » de l’émission de téléréalité The Apprentice, qui a rendu célèbre l’homme d’affaires avant qu’il ne plonge en politique.

L’occasion ratée Alexandre Sirois

Donald Trump s’est retrouvé dans les cordes sur la question de l’avortement. Avant d’être élu pour la première fois, il promettait aux militants républicains qu’il nommerait à la Cour suprême des juges qui reverseraient l’arrêt Roe c. Wade. Il voit bien que cet enjeu lui fera perdre des votes en novembre, il met de l’eau dans son vin, mais il ne parvient pas à convaincre.

Isabelle Hachey

À deux reprises, l’animateur David Muir a demandé à Donald Trump s’il regrettait ses actions lors de l’émeute du 6 janvier 2021. À deux reprises, l’ancien président a esquivé la question. « Je n’ai rien à voir avec le 6-Janvier », a-t-il fini par répondre, avant de rejeter la responsabilité du chaos sur le maire de Washington et sur l’ancienne présidente de la Chambre des représentants Nancy Pelosi. Dommage. Un peu d’introspection aurait été opportune, quoique surprenante, de la part de Donald Trump.

Laura-Julie Perreault

Kamala Harris n’a pas profité de la première question du débat pour remettre les pendules à l’heure sur le bilan économique de l’administration Biden. Malgré trois années d’inflation, les États-Unis connaissent une création d’emplois plus importante que sous l’administration Trump ainsi qu’une hausse des salaires. Donald Trump en a profité pour répéter qu’il a créé une « économie comme on n’en a jamais vu » aux États-Unis. C’est son principal étendard.

Yves Boisvert

L’occasion ratée ou, disons, la gaffe : Trump qui dit qu’il a un « concept de plan » sur l’assurance maladie. Quand l’animateur lui dit : « Donc, vous n’avez pas de plan ? », il répond : « Je ne suis pas encore président. »

Le moment clé du débat Isabelle Hachey

Le plaidoyer senti de Kamala Harris en faveur du droit des femmes à disposer de leur corps a probablement résonné dans des millions de foyers américains. Dans certains États, a-t-elle rappelé, des femmes violées et des adolescentes victimes d’inceste sont désormais forcées de mener leur grossesse à terme. Pour sa part, Donald Trump a refusé de dire s’il opposerait son veto à une interdiction de l’avortement à l’échelle nationale.

Laura-Julie Perreault

Si les hésitations de Joe Biden ont retenu l’attention lors du premier débat présidentiel de cette campagne électorale, cette fois, ce sont les digressions de Donald Trump qui sautaient aux yeux. Lors du segment sur le droit à l’avortement, le candidat républicain tirait dans tous les sens, s’égarait. Il s’est aussi maintes fois contredit, en disant notamment dans la même phrase que Kamala Harris lui empruntait ses idées, qu’elle méritait une casquette « Make America Great Again » avant de la traiter de marxiste. Déroutant.

Yves Boisvert

Harris a maîtrisé la situation tout le long, mais elle a été au sommet de sa performance quand elle a parlé du droit à l’avortement et des conséquences humaines des « interdictions-Trump ».

Alexandre Sirois

C’est la procureure Kamala Harris qui s’est présentée sur scène lors de ce débat et elle a plaidé contre un retour de Donald Trump à la Maison-Blanche avec efficacité. Elle a été particulièrement convaincante sur l’Ukraine, en affirmant que si l’ancien président était toujours à la Maison-Blanche, Vladimir Poutine aurait déjà pris le contrôle de Kyiv. Parce que Donald Trump pense avoir une relation d’amitié avec ce dictateur qui le « mangerait à l’heure du lunch », a-t-elle lancé.

On a trop entendu parler de... Laura-Julie Perreault

L’arrivée de « millions et de millions d’immigrants illégaux ». Chaque fois que Donald Trump ne voulait pas répondre à une question, notamment au sujet de l’assaut du 6-Janvier au Capitole, il repartait sa cassette sur les migrants, qui, selon lui, « détruisent » les États-Unis et « mangent les chats et les chiens » des habitants de Springfield, en Ohio, un énoncé réfuté par les animateurs du débat. Étrangement, on a bien peu entendu parler de solutions.

Alexandre Sirois

D’immigration. Donald Trump sonnait comme un disque rayé en abordant le sujet d’un bout à l’autre du débat… même lorsqu’on l’a questionné sur sa responsabilité quant à l’émeute du 6 janvier 2021. Mais le fait est que, stratégiquement, c’était pour lui un choix judicieux d’attaquer sans relâche sa rivale à ce sujet. Il aurait toutefois dû parler davantage d’inflation.

Yves Boisvert

« Des millions et des millions de personnes, plusieurs criminels, qui envahissent notre pays ». Trump semblait à court de contenu et a répété sa ligne sans cesse.

Isabelle Hachey

Il fallait s’y attendre, les mensonges de Donald Trump ont foisonné dans ce débat. Certains étaient grotesques : selon l’ancien président, des États démocrates pratiqueraient « l’avortement après la naissance ». Autrement dit, l’exécution de bébés à 9 mois ! Et à Springfield, en Ohio, des immigrants haïtiens mangeraient des chiens et des chats domestiques. Dans les deux cas, il s’agit de rumeurs sans fondement. Mention spéciale aux modérateurs, David Muir et Linsey Davis, qui ont rectifié les faits en direct.

On n’a pas assez entendu parler de… Isabelle Hachey

Du contrôle des armes à feu. Kamala Harris a tenu à corriger Donald Trump, qui venait d’affirmer qu’elle voulait éradiquer les armes du pays, en spécifiant qu’elle était elle-même propriétaire d’une arme, tout comme son colistier, Tim Walz. Pas un traître mot sur la fusillade qui a fait quatre morts et neuf blessés dans une école de Géorgie… il y a une semaine à peine. Aux États-Unis, des écoliers sont assassinés dans leurs classes et ça ne fait tout simplement plus débat.

Laura-Julie Perreault

L’environnement ! Les deux candidats ont détourné la question des journalistes d’ABC sur les changements climatiques pour parler plutôt de la vigueur de l’industrie américaine. Assez décevant pour les millions de jeunes Américains qui estiment que cet enjeu est existentiel. Cette esquive pourrait coûter cher à Kamala Harris alors que les fans de Donald Trump savent déjà à quelle adresse il loge.

Yves Boisvert

L’économie. C’est censé être la principale préoccupation des électeurs. À part de déplorer l’inflation ou de promettre de l’aide aux entreprises, c’était léger.

Alexandre Sirois

Des armes à feu. Dans la foulée d’une nouvelle fusillade dans une école – en Géorgie, cette fois –, encore une fois perpétrée avec un fusil d’assaut de type AR-15, et sachant le nombre effarant de tragédies provoquées chaque année par les armes à feu sur le sol américain, il est désespérant de constater que ce sujet n’était pas sur la liste des modérateurs. Et terriblement dommage de voir que Kamala Harris n’a pas plaidé pour un meilleur contrôle des armes à feu.

Qui a gagné ? Yves Boisvert

Kamala Harris, par une bonne marge. Et probablement avant même d’avoir parlé, comme Biden avait perdu avant d’ouvrir la bouche : elle s’est rendue directement à Trump pour lui serrer la main fermement, ce qui l’a pris au dépourvu. Pour toute la suite, il a paru enragé, alors qu’il était posé et maître de la situation contre Biden. Elle a réussi à le piquer en parlant de Poutine qui le « mangerait à l’heure du lunch », tout en étant ferme et précise sur plusieurs enjeux.

Isabelle Hachey

Kamala Harris a réussi à mettre Donald Trump sur la défensive pendant toute la durée du débat. L’ancien président a tenté de réfuter les attaques de sa rivale, mais a semblé désorienté et, surtout, furieux. Il faut dire que Harris ne lui a pas fait de quartier, affirmant d’abord que ses partisans quittaient ses rassemblements « par épuisement et ennui », puis que les dirigeants de la planète se moquaient carrément de lui. En s’attaquant à l’ego de son rival, Kamala Harris savait qu’elle lui ferait mal. Elle ne s’est pas gênée une seconde.

Laura-Julie Perreault

Kamala Harris a remporté le débat haut la main. En fait, c’était presque un hold-up ! Elle a à la fois parlé de son plan, fait le procès de Donald Trump en bonne et due forme et s’est montrée présidentiable tout au long des 107 minutes du débat. Cela dit, elle aurait pu en faire plus pour s’adresser aux jeunes électeurs et à la frange la plus à gauche de la société américaine, mais ça ne semble pas avoir découragé Taylor Swift, qui lui a accordé son appui quelques minutes après la fin du débat. Les présentateurs d’ABC méritent aussi une médaille pour avoir mis les deux candidats devant leurs contradictions et relevé les mensonges et les inexactitudes tout au long du débat sans perdre le rythme.

Alexandre Sirois

Je triche et je nomme : Joe Biden. On lui a forcé la main, c’est vrai, mais il a tout de même choisi de céder sa place à Kamala Harris. Et à la lumière du débat, il a gagné son pari. Jamais il n’aurait pu livrer une aussi bonne performance qu’elle. Elle a à la fois pu tenir tête à Donald Trump et prouver qu’elle a l’étoffe d’une présidente.

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