La tête du journaliste Daniel Renaud mise à prix | RCI
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15 h 04Mis à jour à 16 h 25
« Ça n'a pas de sens », « c'est extrêmement grave » : des politiciens québécois se montrés troublés par la mise à prix de la tête du journaliste spécialisé de La Presse Daniel Renaud, qui est selon eux le symptôme de la désorganisation récente du crime organisé.
J’ai été secoué par ce que j’ai lu ce matin, a avoué le ministre québécois de la Sécurité publique, François Bonnardel à son entrée vendredi à l'Assemblée nationale. Le quotidien La Presse a révélé qu'en 2021, le tueur à gages Frédérick Silva a offert 100 000 $ pour la tête de son reporter, qui suivait de près ses procédures judiciaires.
M. Silva a été reconnu coupable de plusieurs meurtres, mais il agit maintenant comme délateur auprès de la police. Citant son témoignage, La Presse rapporte qu’il avait élaboré un plan de la prison pour tendre un guet-apens au reporter.
À ce moment, Daniel Renaud couvrait assidûment le procès du tueur à gages. C’est la Sûreté du Québec qui en a avisé le reporter en 2022.
Rappelant la mort violente d'un adolescent près du repaire d'un club-école des Hells Angels (nouvelle fenêtre) en septembre, M. Bonnardel n'a pas écarté que cette atteinte à un journaliste soit une démonstration du changement de paradigme immensément important dans la hiérarchie du monde criminalisé. C'est un monde aujourd’hui qui est sans foi ni loi, ou presque.
On n’est pas dans un film, on est au Québec s'est indigné le premier ministre François Legault. Ça vient montrer qu’il faut continuer à regarder avec les policiers ce qu’on peut faire contre le crime organisé.
Ça m'inquiète, a avoué la députée libérale Marwah Rizqy, visiblement troublée en mêlée de presse vendredi. C’est important le rôle que joue toute personne en démocratie, et le quatrième pouvoir, c’est celui des journalistes, a-t-elle ajouté, soulignant que leur travail est non seulement pertinent, il est nécessaire dans une démocratie qui est saine.
Daniel Renaud sentait bien [que Frédérick Silva] n’aimait pas sa présence, mais jamais il n’aurait imaginé que le crime organisé puisse en arriver là, a expliqué le vice-président Information et éditeur adjoint de La Presse, François Cardinal, en entrevue à Tout un matin, sur les ondes d'ICI Première.
M. Renaud était les yeux et les oreilles du public dans ce procès, a ajouté M. Cardinal, en précisant que Daniel était souvent le seul journaliste au procès de Frédérick Silva.
On a cherché à faire taire un journaliste parce qu’il joue son rôle de témoin.Fort de 36 ans d'expérience, le reporter Daniel Renaud se spécialise dans le crime organisé. Il est notamment l’auteur de trois livres à ce sujet.
D'autres tentatives d'assassinat contre des journalistes dans le passéCe n'est pas la première fois dans l'histoire contemporaine québécoise que le crime organisé tente de faire taire des journalistes.
En mai 1973, Jean-Pierre Charbonneau avait été atteint d'une balle dans la salle de rédaction du quotidien Le Devoir. En entrevue à l'émission Pénélope, en mai 2023, sur les ondes d'ICI Première, il avait rappelé que ce qui s'était passé cette journée était encore très précis dans sa mémoire (nouvelle fenêtre).
À l'époque, ses articles sur la corruption et les barons de la mafia avaient dérangé le milieu interlope.
Le 13 septembre 2000, au moment où il prenait ses effets personnels dans le coffre de son auto, le journaliste spécialisé dans la couverture du crime organisé Michel Auger a été criblé de six balles dans le dos dans le stationnement du Journal de Montréal.
Cette opération, commandée par les motards criminalisés, avait suscité l'indignation au Québec.
En pleine guerre de motards, ce drame avait notamment poussé le gouvernement du Québec à demander un renforcement de la loi fédérale antigang. Michel Auger s'est éteint en 2020 (nouvelle fenêtre).