Critique d'End of an Era, de Dua Lipa | Un pas de côté

14 days ago

PHOTO DREW GURIAN, ASSOCIATED PRESS

Dua Lipa - Figure 1
Photo La Presse

Dua Lipa

Optimiste et d’un romantisme lucide, le nouvel album de Dua Lipa est riche en bonnes idées et pauvre en effets de surprise.

Tourner autour du pot n’a jamais été le genre de Dua Lipa. Elle a toujours été directe dans sa façon d’aborder les jeux de l’amour, qu’il s’agisse du ballet de la séduction ou de danse contact au lit. Racidal Optimism, titre de son troisième album, est donc à prendre au pied de la lettre : elle se veut ici lucide et positive jusque dans la douleur de la rupture.

Dua Lipa laisse entendre un virage dès End of an Era, qui lance l’album. Il est question d’un amour neuf, le bon peut-être, raconté sur une pop entraînante évoquant un peu l’électro jazz BCBG du tournant des années 2000. Ce morceau souriant, d’une légèreté estivale, donne aussi à entendre une guitare acoustique qui mouline, qui confère à l’ensemble un côté « organique » inédit chez elle.

Le naturel n’a cependant pas été chassé bien loin. Houdini et Training Season, deux morceaux publiés avant la sortie de Radical Optimism, ramènent nos oreilles en terrain connu, c’est-à-dire cette disco-pop renouvelée, poussée par des basses qui claquent et des claviers très années 1980. Illusion, dévoilée le mois dernier et dans une veine semblable, complète le quatuor des morceaux les plus emballants du disque.

Moins axé sur le désir et les nuits passées à danser que Future Nostalgia, Radical Optimism sonne comme un réveil. La fête n’est pas finie, mais l’envie de quelque chose de plus profond se fait pressante. Dua Lipa chante du point de vue d’une jeune femme sûre d’elle, lasse d’être mal aimée, qui nomme l’amour entier et égalitaire qu’elle cherche. Une pointe d’humour ici et là laisse entendre qu’elle cédera peut-être encore au grand jeu de la séduction, mais pas à n’importe quel prix. Sa lucidité va jusque-là dans l’admission des glissements possibles et le regard un brin narquois qu’elle pose sur la romantique finie qu’elle avoue être.

Son optimisme transparaît aussi dans une grandeur d’âme et une gratitude (Maria, Happy For You) qu’on n’attendait pas dans la vision de l’amour qu’elle affiche et qu’on entend rarement en chanson. Dua Lipa veut creuser plus avant les mouvements du cœur, c’est clair, mais se heurte aux limites des textes concoctés avec son équipe d’auteurs. C’est le désavantage du ton direct qui a fait sa marque.

Ce qui étonne davantage, c’est la pauvreté mélodique d’ensemble du disque. Les chansons These Walls et French Exit manquent vite d’élan. La volonté d’élargir l’univers est manifeste ici : Dua Lipa flirte avec l’europop (Falling Forever, où sa voix est superbement puissante), tâte le dépouillement piano voix (Anything for Love) et pousse son chant vers la soul (Watcha Doing). Elle cherche, ce qui est de bon augure pour sa longévité, mais on le sent trop : l’ensemble manque de pétillant.

Comparé à quantité d’albums d’autres artistes pop, Radical Optimism est une bombe. Or, lorsqu’on compare Dua Lipa à elle-même, ce troisième disque est une ou deux coches en dessous de nos attentes. Et c’est plutôt sur Dance the Night qu’on passera l’été à danser. Comme l’an dernier.

Extrait d’End of an Era, de Dua Lipa

POP

Radical Optimism

Dua Lipa

Warner Records UK

6,5/10

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